N & E
Napoléon & Empire

Traité de Valençay

Traité de Valençay avec Ferdinand VII, 11 décembre 1813

Sa Majesté l'Empereur des Français, Roi d'Italie, et Sa Majesté Catholique, également animés du désir de faire cesser les hostilités et de conclure un traité de paix définitif entre les deux puissances, ont nommé plénipotentiaires à cet effet, savoir :

Sa Majesté l'Empereur et Roi, M. Antoine-René-Charles-Mathurin, comte de Laforest, membre de son Conseil d'État, grand-officier de la Légion d'honneur, grand-croix de l'ordre de la Réunion ;

Et S.M. Ferdinand VII, Don Michel de Carvajal, Duc de San-Carlos, comte del Puerto, grand-maître héréditaire des postes des Indes, Grand d'Espagne de la première classe, majordome major de Sa Majesté Catholique, lieutenant général des armées, gentilhomme de la Chambre en service, grand-croix et commandeur de différents ordres ;

Gravure représentant la signature du traité de Valençay

Lesquels, après l'échange de leurs pleins pouvoirs respectifs, sont convenus des articles suivants :

Article I.

Il y aura à l'avenir et à dater de la ratification du présent traité, paix et amitié entre S.M. Ferdinand VII et ses successeurs, et S.M. l'Empereur et Roi et ses successeurs.

Article II.

Toutes les hostilités, tant sur terre que sur mer, cesseront entre les deux nations, savoir : dans leurs possessions continentales d'Europe, immédiatement après l'échange des ratifications; quinze jours après, dans les mers qui bordent les côtes d'Europe et celles d'Afrique en deçà de l'Equateur; quarante jours après l'échange, dans les pays et mers d'Afrique et d'Amérique au delà de l'Equateur; et trois mois après, dans les pays et mers situés à l'est du Cap de Bonne-Espérance.

Article III.

S.M. l'Empereur et Roi reconnaît Don Ferdinand et ses successeurs selon le droit d'hérédité établi par les lois fondamentales d'Espagne, comme Roi d'Espagne et des Indes.

Article IV.

S.M. l'Empereur et Roi reconnaît l'intégrité du territoire d'Espagne telle qu'elle existait avant la guerre actuelle.

Article V.

Les provinces et places actuellement occupées par les troupes françaises seront remises, dans l'état où elles se trouveront, aux gouverneurs et aux troupes espagnoles qui y seront envoyés par le Roi.

Article VI.

S.M. le Roi Ferdinand s'engage de son côté à maintenir l'intégrité du territoire d'Espagne, des îles, places et présides adjacents, notamment de Mahon et de Ceuta : il s'engage à faire évacuer ces provinces, places et territoires par les gouverneurs et l'armée britanniques.

Article VII.

Une convention militaire sera conclue entre un commissaire espagnol et un commissaire français pour que l'évacuation des provinces espagnoles occupées par les Français ou par les Anglais soit faite simultanément.

Article VIII.

S.M.C. et S.M. l'Empereur et Roi s'engagent réciproquement à maintenir l'indépendance de leurs droits maritimes tels qu'ils ont été stipulés dans le traité d'Utrecht, et tels que les deux nations les avaient maintenus jusqu'à 1792.

Article IX.

Tous les Espagnols qui ont été attachés au roi Joseph et qui l'ont servi ou qui l'ont suivi, rentreront dans les honneurs, droits et prérogatives dont ils jouissent. Tous les biens dont ils auront été privés leur seront restitués. Ceux qui voudraient rester hors d'Espagne, auront un terme de dix années pour vendre leurs biens et prendre les arrangements nécessaires; leurs droits aux successions qui s'ouvriraient en leur faveur leur seront conservés, et ils pourront jouir de leurs biens et en disposer sans être soumis au droit d'aubaine ou à tout autre droit.

Article X.

Toutes les propriétés mobilières et immobilières appartenant en Espagne à des Français ou à des Italiens, leur seront restituées, telles qu'ils en jouissaient avant la guerre. Toutes les propriétés séquestrées ou confisquées en France ou en Italie sur des Espagnols, seront également restituées. Des commissaires seront nommés de part et d'autre pour régler toutes les questions contentieuses qui pourraient exister ou survenir entre des Français et Italiens et des Espagnols, soit pour des discussions d'intérêt antérieures à la guerre, soit pour celles qui se seraient élevées depuis.

Article XI.

Les prisonniers faits de part et d'autre seront rendus, soit qu'ils se trouvent dans les dépôts ou tout autre lieu, soit même qu'ils aient pris du service, à moins qu'aussitôt après la paix, ils ne déclarent devant un commissaire de leur nation qu'ils veulent rester au service de la puissance chez laquelle ils se trouvent.

Article XII.

La garnison de Pampelune, les prisonniers de Cadix, de la Corogne, de la Méditerranée et ceux de tout autre dépôt, qui auraient été remis aux Anglais seront également rendus, soit qu'ils se trouvent en Espagne, soit qu'ils aient été envoyés en Amérique ou en Angleterre.

Article XIII.

S.M. Ferdinand VII s'engage à faire payer au Roi Charles IV et à la Reine son épouse, une somme annuelle de trente millions de réaux qui sera acquittée régulièrement et par quarts de trois mois en trois mois. À la mort du Roi, deux millions de francs formeront le douaire de la Reine. Tous les Espagnols à leur service auront la liberté de résider hors du territoire espagnol, partout où leurs majestés. le jugeront convenable.

Article XIV.

Il sera conclu un traité de commerce entre les deux puissances, et jusqu'à sa conclusion, les relations commerciales seront sur le même pied qu'avant la guerre de 1792.

Article XV.

Les ratifications du présent traité seront échangées à Paris dans le terme d'un mois ou plus tôt si faire se peut.


Fait et signé à Valençay, le 11 décembre 1813.

Le Comte de Laforest

Le Duc de San Carlos