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Napoléon & Empire

Traité de Tolentino

Traité de Tolentino du 19 février 1797

Le général en chef Bonaparte, commandant l'armée d'Italie, et le citoyen Cacault, agent de la République Française en Italie, chargés des pouvoirs du Directoire exécutif ; et Son Eminence le cardinal Mattei, M. Louis Caleppi, le duc Braschi, le marquis Massimo, plénipotentiaires de Sa Sainteté, sont convenus de ce qui suit :

Article I.

Il y aura paix, amitié et bonne intelligence entre la République Française et le Pape Pie VI.

Article II.

Le Pape révoque toute adhésion, consentement et accession par écrit, ou secrète, par lui donnée, à la coalition armée contre la République Française, à tout traité d'alliance, offensive ou défensive, avec quelque puissance ou état que ce soit. Il s'engage à ne fournir, tant pour la guerre actuelle que pour les guerres à venir, à aucune des puissances armées contre la République Française, aucun secours en hommes, vaisseaux, armes, munitions de guerre, vivres et argent, à quelque titre et sous quelque domination que ce puisse être.

Signature du traité de Tolentino
Signature du traité de Tolentino

Article III.

Sa Sainteté licenciera, dans cinq jours après la ratification du présent traité, les troupes de nouvelle formation, ne gardant que les régiments existants avant le traité de l'armistice signé à Bologne.

Article IV.

Les vaisseaux de guerre ou corsaires des puissances armées contre la République, ne pourront entrer et encore moins demeurer pendant la présente guerre, dans les ports et rades de l'État ecclésiastique.

Article V.

La République Française continuera à jouir, comme avant la guerre, de tous les droits et prérogatives que la France avait à Rome, et sera en tout traitée comme les puissances les plus considérées, et spécialement à l'égard de son ambassadeur et ministre, et des consuls et vice-consuls.

Article VI.

Le Pape renonce purement et simplement à tous les droits qu'il pourrait prétendre sur les villes et territoire d'Avignon, le comtat Venaissin et ses dépendances, et transporte, cède et abandonne lesdits droits à la République Française.

Article VII.

Le Pape renonce également à perpétuité, cède et transporte à la République Française, tous ses droits sur les territoires connus sous les noms de légations de Bologne, de Ferrare et de Romagne. Il ne sera porté aucune atteinte à la religion catholique dans les susdites lègations.

Article VIII.

La ville, citadelle et les villages formant le territoire de la ville d'Ancône, resteront à la République Française, jusqu'à la paix continentale.

Article IX.

Le Pape s'oblige pour lui et pour ceux qui lui succéderont, à ne transporter à personne le titre de seigneurie attaché aux territoires par lui cédés à la République Française.

Article X.

Sa Sainteté s'engage à faire payer et délivrer, à Foligno, aux trésoriers de l'armée française, avant le 15 du mois de ventôse courant (le 5 mars 1797, vieux style), la somme de 15 000 000 de livres tournois de France, dont 10 000 000 en numéraire, et 5 000 000 en diamants et autres effets précieux, sur celle d'environ 16 000 000 qui reste due suivant l'article IX de l'armistice signé à Bologne le 3 messidor an IV (23 juin 1796) et ratifié par Sa Sainteté le 27 juin.

Article XI.

Pour acquitter définitivement ce qui reste à payer pour l'entière exécution de l'armistice signé à Bologne, Sa Sainteté fera fournir à l'armée huit cents chevaux de cavalerie enharnachés, huit cents chevaux de trait ; des boeufs et des buffles, et autres objets produits du territoire de l'Eglise.

Article XII.

Indépendamment de la somme énoncée dans les deux articles précédents, le Pape paiera à la république francaise, en numéraire, diamants ou autres valeurs, la somme de 15 000 000 de livres tournois de France, dont 10 000 000 dans le courant du mois de mars, et 5 000 000 dans le courant d'avril prochain.

Article XIII.

L'article VIII du traité d'armistice signé à Bologne, concernant les manuscrits et objets d'art, aura son exécution entière et la plus prompte possible.

Article XIV.

L'armée française évacuera l'Ombrie, Perugia, Camerino, aussitôt que l'article X du présent traité aura été exécuté.

Article XV.

L'armée française évacuera la province de Macerata, à la réserve d'Ancône, de Fano, et de leur territoire, aussitôt que les cinq premiers millions de la somme mentionnée à l'article XII du présent traite auront été payés et délivrés.

Article XVI.

L'armée française évacuera le territoire de la ville de Fano et du duché d'Urbino, aussitôt que les cinq seconds millions de la somme mentionnée à l'article XII du présent traité auront été payés et délivrés et que les articles III, X, XI et XIII du présent traité auront été exécuté ; les cinq derniers millions faisant partie de la somme stipulée en l'article XII seront payés au plus tard dans le courant d'avril prochain.

Article XVII.

La République Française cède au Pape tous ses droits sur les différentes fondations religieuses françaises, dans les villes de Rome et Lorette ; et le Pape cède en toute propriété à la République Française tous les biens allodiaux appartenant au Saint-Siége dans les trois provinces de Ferrare, de Bologne, et de la Romagne, et notamment la terre de Merrola et ses dépendances. Le Pape se réserve cependant, en cas de vente, le tiers des sommes qui en proviendront, lequel devra être remis à ses fondés de pouvoir.

Article XVIII.

Sa Sainteté fera désavouer, par un ministre à Paris, l'assassinat commis sur la personne du sécretaire de légation Basseville. Il sera payé par Sa Sainteté, et par elle mis à la disposition du gouvernement français, la somme de 300 000 livres, pour être répartie entre ceux qui ont souffert de cet attentat.

Article XIX.

Sa Sainteté fera mettre en liberté les personnes qui peuvent se trouver détenues à cause de leurs opinions politiques.

Article XX.

Le général en chef rendra la liberté de se retirer chez eux à tous prisonniers de guerre des troupes de Sa Sainteté, aussitôt après avoir reçu la ratification du présent traité.

Article XXI.

En attendant qu'il soit conclu un traité de commerce entre la République Française et le Pape, le commerce de la République sera rétabli et maintenu dans les États de Sa Sainteté sur le pied de la nation la plus favorisée.

Article XXII.

Conformément à l'article VI du traité conclu à La Haye le 27 floréal de l'an III (14 mai 1795), la paix conclue par le présent traité entre la République Française et Sa Sainteté, est déclarée commune à la république Batave.

Article XXIII.

La poste de France sera rétablie à Rome, de la même manière qu'elle existait auparavant.

Article XXIV.

L'école des Arts, instituée à Rome pour tous les Français, y sera rétablie, et continuera d'être dirigée comme avant la guerre. Le palais appartenant à la République, où cette école était placée, sera rendu sans dégradations.

Article XXV.

Tous les articles, clauses et conditions du présent traité, sans exception, sont obligatoires à perpétuité, tant pour Sa Sainteté le Pape Pie VI que pour ses successeurs.

Article XXVI.

Le présent traité sera ratifié dans le plus court délai possible.

Fait et signé au quartier général de Tolentino par les susdits plénipotentiaires, le 1er ventôse an V (19 février 1797) de la République Française, une et indivisible.

Bonaparte.

Cacault.

Le cardinal Mattei.

Louis Callepi.

Le duc Braschi-Ruffi.

Le marquis Camille Massimo.