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Napoléon & Empire

Piotr Khristyanovitch Wittgenstein (1769-1843)

Prince de Sayn-Wittgenstein

Blason de Piotr Khristyanovitch Wittgenstein (1769-1843)

Piotr Khristyanovitch Wittgenstein (Витгенштейн, Пётр Христианович) vient au monde le 5 janvier 1769 à Pereslavl-Zalesski au nord-est de Moscou (d’autres sources citent la ville de Nizhyn en Ukraine). Son père est le comte Christian Louis Casimir de Sayn-Wittgenstein-Ludwigsburg et sa mère Amalie Ludowika Finck von Finckenstein. Toute la famille est d’origine prussienne, mais sert la Russie depuis le règne (1741-1762) de la Tsarine Elizabeth Petrovna, fille de Pierre le Grand.

À vingt ans, Wittgenstein entame sa carrière militaire comme sergent dans le régiment Semionovsky de gardes du corps. Il y est promu cornette en 1790, puis sous-lieutenant en 1791. En 1793, le régiment ukrainien de cavalerie légère l’accueille en tant que premier major. Le soulèvement polonais de 1794, dirigé par Tadeusz Kościuszko, lui offre son baptême du feu, qu’il reçoit comme volontaire dans le corps de Wilhelm Christoforovich Derfelden en Lituanie. Wittgenstein termine l’année au grade de lieutenant-colonel.

Il poursuit son ascension à la faveur des campagnes caucasiennes, auxquelles il participe à partir de 1796, d’abord au sein du régiment de hussards Elisavetgrad. L’année suivante le voit rejoindre successivement le régiment de dragons de Rostov puis celui des hussards Akhtyrsky. Wittgenstein est bientôt nommé colonel, en 1798, puis major général et chef du régiment de hussards de Marioupol en 1799. Au début de l’année 1801, il quitte le service, mais est vite rappelé après la mort du tsar Paul Ier.

En 1805, Wittgenstein participe à la campagne d’Autriche et commande une brigade du corps de Pierre Bagration lors de la bataille d’Austerlitz. Un nouveau conflit russo-turc l’envoie l’année suivante guerroyer dans le Caucase. Il retourne se battre contre les Français en 1807, à la frontière germano-polonaise. Le 12 décembre de cette année-là, il est promu lieutenant-général.

L’armée confie à Wittgenstein un corps d’infanterie légère de 9 000 hommes, à la tête duquel il assure la garde de la côte du golfe de Finlande durant la guerre russo-suédoise de 1808-1809. Une fois les hostilités terminées, il reste cantonné dans le sud de la Finlande jusqu’en 1811.

Durant toute la campagne de Russie de 1812, Wittgenstein commande l’aile droite de l’armée russe. À sa tête, il parvient dans un premier temps à contenir les troupes françaises qui lui font face. Plusieurs engagements les opposent. Le premier, les 30 juillet et 1er août, à Kliastitsy, lui permet de prendre l’avantage sur le IIe corps de Nicolas Oudinot. Le second se déroule près de Polotsk les 17 et 18 août, ville dans laquelle s’est retiré Oudinot et où il a retrouvé le VIe corps de Laurent de Gouvion Saint-Cyr. Blessé durant la bataille, Oudinot cède sa place à Gouvion Saint-Cyr, qui défait Wittgenstein et y gagne son bâton de maréchal. Après ces deux combats aux résultats contradictoires, Gouvion comme Wittgenstein vont rester fixés sur leurs positions jusqu’à la mi-octobre. Le tsar Alexandre Ier s’en satisfait et donne, dit-on, le surnom de « sauveur de Saint-Pétersbourg » à son général. Le compliment paraît quelque peu exagéré, car si l’aile gauche de Napoléon menace effectivement la capitale russe, c’est sans réelle intention de l’attaquer sérieusement.

En octobre 1812, du 18 au 20, une nouvelle bataille oppose Wittgenstein à Gouvion Saint-Cyr, toujours à Polotsk. Cette fois, le Russe l’emporte. Il reçoit en récompense le grade de général de cavalerie. Le 14 novembre suivant, il récidive à Smoliani, prenant pour l'occasion le dessus sur les maréchaux Claude-Victor Perrin, dit Victor et Oudinot. Son action s'avère moins efficace durant les jours qui précèdent le franchissement de la Bérézina par les restes de l’armée française. Les informations erronées dont Wittgenstein dispose sur les effectifs ennemis — encore largement surestimés par le commandement russe tout entier — le conduisent à un excès de prudence dans le mouvement de ses troupes. L’échec de la manoeuvre russe visant à bloquer Napoléon sur la rive gauche de la Bérésina et à provoquer sa capitulation en rase campagne lui incombe donc en partie. Il échappe cependant au blâme et se console en songeant qu’il est le premier à avoir capturé une division française au complet, celle du général Louis Partouneaux.

L’année 1813 commence sous les meilleurs auspices pour Wittgenstein. En janvier, il remplace Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov, récemment décédé, comme commandant en chef de l’armée russe. À la tête de celle-ci, il entre à Berlin le 7 mars en compagnie des forces prussiennes du général Johann David Ludwig Yorck. La suite est moins glorieuse. Battu à Lützen puis à Bautzen, Wittgenstein est écarté de son poste et remplacé par Mikhaïl Bogdanovitch Barclay de Tolly. On lui confie cependant un corps d’infanterie avec lequel il poursuit la guerre et qui est engagé lors des batailles de Dresde et de Leipzig.

En 1814, la participation de Wittgenstein à la campagne de France tourne court. Le 27 février, il est blessé à la jambe durant le combat de Bar-sur-Aube qu'il dirige avec Karl Philipp von Wrede. Le 7 mars, il quitte le commandement du VIe corps de la Grande armée alliée que dirige le prince autrichien Charles-Philippe de Schwarzenberg. Selon certains, cette démission tiendrait moins à son état de santé qu’au dépit ressenti en voyant son seul général homologue bavarois promu au maréchalat pour leur victoire conjointe.

En mars 1815, le retour de Napoléon de son exil à l'île d'Elbe rappelle Pierre Wittgenstein au service. Il reprend le chemin de la France à la tête de troupes cantonnées jusque-là aux confins de la Lituanie et de la Pologne. Comme le reste de l’armée russe, il se trouve encore en route lorsque la bataille de Waterloo le 18 juin et l’abdication de Napoléon le 22 mettent fin aux hostilités.

Wittgenstein consacre quelques mois de 1816 à se soigner, puis est nommé en mai 1818 commandant en chef de la deuxième armée, en remplacement de Levin August von Bennigsen, et membre du Conseil d’État. Le 3 septembre 1826, le nouveau tsar, Nicolas Ier, l'élève au rang de maréchal.

Wittgenstein termine sa carrière militaire au cours de la guerre russo-turque de 1828-1829, au début de laquelle il commande avec succès sur le front du Danube. En janvier 1829, il demande cependant son congé pour raison de santé. Il l’obtient le mois suivant.

Le roi de Prusse lui accorde en mai 1834 la dignité de prince de Wittgenstein-Sayn-Berleburg, que le tsar lui permet deux ans plus tard d’utiliser en Russie.

Wittgenstein meurt paisiblement à Lemberg [Lvov], le 11 juin 1843. Il est enterré dans la ville de Camenca [Каменка], en Transnistrie / Moldavie.

"Pierre Wittgenstein", par George Dawe (St James's, Westminster 1781 - Kentish Town 1829).

"Pierre Wittgenstein", par George Dawe (St James's, Westminster 1781 - Kentish Town 1829).

Toutes les dates sur cette page sont dans le calendrier grégorien (alors en avance de onze puis douze jours sur le calendrier julien en usage en Russie à cette époque).

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Piotr Khristyanovitch Wittgenstein (1769-1843)
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"Pierre Wittgenstein". Anonyme du XIXème siècle.